Shutter Island de Martin Scorsese

Réalisateur : Martin Scorsese
Acteurs : Leonardo Dicaprio, Mark Ruffalo, Ben Kingsley
Genre : Thriller
Durée : 2h17
Année de production : 2008

Si on est fan du tandem Scorsese/ Di Caprio, on attendait ce film comme une goutte d'eau dans un désert. Malgré les délais courts, on a cette foutue frustration qui s'accumule et la vilaine impression que ça ne va jamais arriver.

Here we go !

Le postulat de départ fleure bon le scénario classique vu et revu. Le duo d'enquêteur débarque sur une île remplie de fous dangereux pour chercher une criminelle disparue. De quoi faire un bon polar noir se déroulant dans les années 50, donc un contexte angoissant d'après-guerre. Mais Martin Scorsese n'est pas n'importe quel réalisateur. A 68 ans, c'est un touche-à-tout boulimique de cinéma depuis son plus jeune âge et influencé de toute part part des notions comme la violence, le machisme ou l'identité (ici très présente, surtout lorsque Daniels doit mettre le costume du personnel pénitencier) comme on peut le voir dans sa filmographie (Raging Bull, Taxi Driver).

Le réalisateur retranscrit donc ici un univers angoissant et nerveux, à l'image de la palette de personnage qui le composent, pour nous plonger dans l'enfer psychiatrique dès les premières minutes : musique stressante, surillumination aveuglante qui donne une impression de migraine, plans larges...La mise en scène quand à elle est rapide et alterne donc histoire réelle et flash-back psychédélique du héros, enchaînant également une multitude de figure. On pourrait se sentir perdu au milieu de tout cela mais n'est-ce pas le but de Scorsese ? Depuis le début et grâce aux flash-back, l'objectif est de nous permettre de nous identifier à Daniels, ancien soldat traumatisé, veuf depuis peu et surtout suspicieux en ce qui concerne la nature humaine. Nous le suivons pas à pas, relevons avec lui ses découvertes, partageant ses pensées les plus intimes et ses doutes et surtout

Spoiler:

Dans cette intrigue complexe, on ne peut qu'applaudir la performance de Leonardo Dicaprio (mon Dieu, mon maître), ultrabrillant dans sa composition d'homme malade en quête de vengeance, mais également des autres comme Ben Kingsley qui campe un docteur à la fois touchant par sa foi dans les hommes et en même temps inquiétant par les mystères qu'il entretient. Mark Ruffalo tient suffisamment la route pour que l'on sente son ambiguïté sans pour autant choisir un camp (en tout cas, pas avant une bonne heure) et Michel Williams et Emily Mortimer incarnent la folle féminité avec une inquiétante délicatesse.

Au-delà de ça, la fin du film soulève bien des questions. Si Shutter Island se déroule tout de long sans que l'on ne se pose des questions sur la psychologie humaine que dire du dénouement final ? En un quart d'heure, montre en main, les pièces du puzzle s'assemblent avant de former un tout tellement évident qu'on refuse d'y croire. Et pourtant, les faits sont là, et on en vient à se demander si nous-même, nous n'avons pas un peu de folie au fond de nous. Après tout, la normalité est une facette très répandue chez les fous dangereux.

Pour finir, ce thriller est si ambigû et bien mené que plusieurs fins sont envisageables.

Spoiler:

Pour ma part, je pense que celle qu'on envisage d'instinct nous permet de nous positionner face à ce qu'on appelle la folie.
Certains reprocheront peut-être trop de ressemblances avec le film Un homme d'exception et ils n'ont pas tort mais le traitement Scorsesien et l'interprétation Dicaprienne en font un film original, noire et poisseux d'angoisse. J'adhère !

8/10 parce qu'eux et moi, c'est pour la vie